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Writer's block, procrastination et peurs

  • Photo du rédacteur: PK
    PK
  • 24 oct. 2019
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 20 avr. 2020

J'ai longtemps cru que je n'avais jamais eu de writer's block. J'ai compris, plutôt récemment, que l'idée que je m'en étais fait via les articles que j'avais pu lire, les témoignages que j'avais glanés sur internet ici ou là, ne correspondait pas du tout à ce que je vivais.


On parle souvent du writer's block comme de la peur de la page blanche. Avant je pensais que cela représentait uniquement ce phénomène d'être assis devant son carnet ou traitement de texte, et de ne rien pouvoir être capable d'écrire, d'être complètement à sec, que même en grattant dans le fond de ses poches, il n'y avait rien, absolument rien. Comme si on avait utilisé toutes ses ressources, toute sa créativité, au point que tout soit vide, et que ce désert créatif durerait autant de temps que le "writer's block" avait décidé de s'installer, probablement de nombreuses semaines, voire des mois.


Pour moi qui n'avais pas le sentiment de vivre cette situation, j'ai toujours trouvé cela très abstrait. J'ai même pensé que c'était un mythe. Un truc qu'on brandit pour faire peur, et qui pour moi résonnait comme un "Seuls les vrais auteurs ont des writer's block". Ce qui me gratifiait au passage d'un sentiment coupable de ne pas être "une vraie autrice", autrement dit je me coltinais un bon syndrome de l'imposteur.


J'ai rarement reconnu mes passages à vide, mes "pannes" d'idées comme étant un writer's block. Le writer's block est, à mon sens, bien plus effrayant qu'un face à face avec une simple page blanche.


J'ai fini par comprendre que cette définition du writer's block que j'avais, était non seulement abstraite, mais aussi très incomplète. Elle ne correspondait qu'à un seul aspect du problème: le fait de ne pas écrire parce qu'on est, semble-t-il, à court d'idées. Il ne s'agit là que de la conséquence d'autres phénomènes qui se produisent intérieurement, et qui, il me semble, ne sont que trop peu évoqués lorsque l'on parle du writer's block.


Souvent je lis ici ou là, "il faut établir une routine de travail et s'y tenir", "faites comme Hemingway qui écrivait uniquement 5 minutes par jour", "pour ne pas avoir à faire face au writer's block, il faut écrire tous les jours!" etc. etc. Pour moi, ces conseils, ces consignes anti-blocage sont tout aussi abstraits. Déjà, établir des comparaisons avec d'illustres auteurs ou autrices, ça ne met pas spécialement en confiance pour combattre son writer's block. Cela rajoute encore plus de distance et de difficulté à la tâche. Et si jamais il est impossible de tenir une routine de travail? même 5 minutes par jour? Ou si l'on n'écrit pas un jour, ou plusieurs jours d'affilée? Est-ce que ça veut dire qu'on est condamné au writer's block à répétition? Tous ces conseils, cela ne règle pas du tout mon writer's block, au contraire ça le renforce même un peu plus. Ce sont autant d'injonctions à être quelqu'un qu'on n'est pas forcément. Et si l'on n'arrive pas à être cette personne qui respecte 5 minutes d'écriture par jour, le sentiment d'échec est d'autant plus grand.



Alors, si rester le cul vissé sur sa chaise devant sa page blanche pendant des heures est la conséquence du writer's block, quelle en est la définition? Il est très probable qu'elle soit différente pour chacun. Cependant, de manière générale, il me semble assez juste de dire qu'un writer's block c'est : des peurs internes aux multiples origines qui freinent ou stoppent l'élan de créativité et l'acte créatif, et poussent à se refermer sur soi, abandonner, voire carrément déprimer. Ces peurs peuvent être par exemple : la peur de l'échec, la peur de ne jamais réussir, la peur de perdre son temps, la peur de gâcher sa vie, la peur de se tourner en ridicule... La liste peut être longue.


La première fois que j'ai rencontré cette idée de peurs qui nous empêchent d'écrire, je n'y ai pas vraiment cru. Ou plutôt je devrais dire "la première fois que j'ai réellement pris conscience de cette notion de peurs". Car si elle était évoquée dans de nombreux articles, elle ne m'avait pas assez frappée pour que je la voie véritablement, mon cerveau l'ayant carrément occultée! Et lorsque enfin j'en prends conscience, le premier réflexe est plutôt de me braquer et de me juger sévèrement. Enfin voyons, je n'ai pas peur d'écrire, c'est ridicule! C'est certainement parce que je ne suis pas talentueuse/assez travailleuse/originale/persévérante etc. que je n'arrive pas à écrire!

Dans ce cas, pourquoi ai-je l'estomac noué? Pourquoi ai-je des palpitations? Pourquoi je n'ai qu'une envie c'est de me cacher sous ma couette? Ça ressemble quand même un peu aux symptômes de la peur...


L'idée a fini par faire son chemin, et lorsque j'ai commencé à admettre que j'avais peur (des peurs!), il n'y a qu'une chose que je pouvais faire : démonter toutes ces peurs une à une, faire en sorte qu'elles n'aient plus d'arguments solides et les renvoyer au panier avec mon writer's block.


Cependant j'ai vite réalisé par la suite, qu'il y avait une autre sorte de writer's block. Un writer's block qui n'est pas dirigé par la peur. Il se manifeste souvent par ce qu'on appellerait de la "procrastination". La conséquence est la même : on n'écrit pas, ou très peu. On a l'impression de n'avoir aucune idée. On est très vite déconcentré, on zone sur internet pendant des heures... Très vite, le temps dédié à l'écriture passe, et on n'a pas aligné beaucoup de mots. Tant pis, on écrira demain, ou après-demain. Ou la semaine prochaine. C'est comme un passage à vide. Le cerveau semble tourner en rond à la recherche d'une idée, mais il n'y a plus rien. Pourtant, quelques jours plus tard, on se remet sur son travail et oh miracle! l'énergie, la créativité est de retour, on écrit!


Ce writer's block là, il n'y a pas de peurs impliquées, mais il y a très souvent de la culpabilité. La culpabilité de ne pas avoir assez travaillé, de ne pas avoir été assez productif, efficace etc. Or, il me semble que souvent on assimile trop ce phénomène de blocage, de cerveau qui tourne à vide, à de la procrastination dans le mauvais sens du terme. "Procrastiner", cela a une mauvaise connotation. C'est être fainéant. C'est remettre à demain quelque chose qu'on peut faire aujourd'hui... Et si, on ne pouvait réellement pas écrire aujourd'hui? Qu'il ne s'agissait pas d'une histoire de bonne volonté, mais plutôt d'un processus normal? Et que ce qu'on est en train de faire, ça s'appelle "réfléchir"?


Il me semble normal lorsqu'on doit inventer une histoire, c'est-à-dire littéralement tout un monde, qu'on ait besoin de temps pour soi-même la construire, la penser. Même quand on ne réfléchit pas directement à un problème, notre cerveau lui, ne s'arrête jamais d'y penser. Il tourne secrètement dans le fond. Comme un ordinateur. C'est comme s'il était en train de charger. Il faut simplement attendre que le sablier ait enfin fini de tourner.


Ce qui m'agace particulièrement quand je lis des articles au sujet du writer's block, c'est qu'on l'associe beaucoup trop souvent à une sorte de nonchalance, de fainéantise déguisée, qu'on se donnerait des excuses "parce qu'on ne se sent pas l'envie d'écrire". Je n'ai jamais trouvé que j'étais fainéante face à l'écriture, mais tous ces articles et ces conseils mal orientés m'ont toujours fait grandement culpabiliser et croire que je ne mettais pas assez de cœur à la tâche.


Pour moi le writer's block, c'est deux processus : un de construction, et un de protection. Un sablier et un bouclier. Il n'est question ni de fainéantise, ni de talent. Si on ne sait pas quelle sorte de writer's block on rencontre, ni pourquoi on le rencontre, comment des recettes anti-blocage peuvent-elles réellement fonctionner? D'autant plus qu'il y a certainement autant de writer's block différents qu'il y a d'auteurs et autrices. Le fond du problème, il me semble, réside essentiellement dans les causes du writer's block et dans notre capacité à les reconnaître, plus que dans la manifestation à proprement parler de ses symptômes.


Après plusieurs mois d'observations et d'expérimentations, je commence seulement à mieux comprendre quels sont les mécanismes qui agissent lorsque j'ai un blocage, à savoir quelles méthodes, quelles astuces me permettent d'en sortir plus facilement. Même si je ne m'en débarrasse pas totalement, je deviens progressivement plus habile et plus réactive pour contrer mes peurs et mes writer's blocks.


Et vous, qu'est-ce qui vous empêche d'écrire? Avez-vous plusieurs sortes de writer's block comme moi? Savez-vous comment les contrecarrer, ou comment les éviter?

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